Portrait de Nadia Payet, diplômée CPE Lyon et désormais à la tête du département technique en charge de la navigation GPS chez Google aux USA

Je quitte l’île de la Réunion en 2001 pour poursuivre mes études à CPE Lyon après deux ans en classes préparatoires. Je suis diplômée en 2005, après une année de césure en Allemagne chez Infineon Technologies et une année d’échange aux Etats-Unis à Oregon State University. Je reviens aux Etats-Unis en 2005 pour commencer mon doctorat et j’obtiens mon PhD en informatique, machine learning et computer vision en 2011.

Je démarre alors ma carrière professionnelle chez Amazon, au sein du département Kindle pendant un an. En 2012, je rejoins Google, et depuis 6 ans je travaille sur Google Maps Android.

J’ai commencé chez Google en tant qu’ingénieur en informatique (2013), puis je suis devenue chef de projet (2014 & 2015), ensuite je suis passée manager d’une petite équipe (4 personnes, 2016 & 2017), et aujourd’hui je manage 13 personnes à temps plein (2018), et très souvent aussi des stagiaires ou contractuels.

Basée à Seattle, je suis à la tête du département technique en charge de la navigation GPS. Je gère quatre équipes, et je voyage souvent à la rencontre de nos utilisateurs aux quatre coins du monde. En 2018, je suis allée en Inde et au Brésil pour mieux comprendre les besoins locaux en matière de transports, afin de construire la navigation GPS du futur.

Au jour le jour, je passe en revue les projets de mes équipes, et encourage tous mes ingénieurs à être curieux et à proposer leurs idées pour améliorer l’expérience de la navigation sur Google Maps. Je discute aussi avec mes ingénieurs individuellement à propos de leur carrière, leurs aspirations, et les difficultés rencontrées auxquelles je peux apporter mon expertise technique.

On manque cruellement de représentation féminine dans les domaines techniques, et c’est scientifiquement prouvé que des équipes diversifiées et équilibrées hommes/femmes sont bien plus productives et efficaces.

Ma tâche est de recruter davantage de femmes dans ces domaines, et ça commence très tôt, dès le lycée ou même avant parfois. J’essaie donc de donner de la perspective aux jeunes femmes qui n’ont pas encore décidé de leurs parcours étudiants, ou qui hésitent à se lancer professionnellement, bien qu’ayant toutes les qualifications nécessaires.

Je participe à beaucoup de programmes pour la diversité au sein de Google, par exemple, je suis un mentor pour 4 femmes ingénieurs depuis plus de 2 ans. Je suis aussi une avocate pour les ingénieurs “black” dans l’entreprise, et j’ai suivi une formation spéciale pour coacher ces ingénieurs en particulier.

J’interviens aussi en lycée et à l’Université auprès des étudiantes, surtout à Oregon State University et à l’Université de Washington à Seattle. J’étais récemment de retour à la Réunion pour la fête de la science, où j’ai animé un atelier “femmes de sciences” pour les collégiens et lycéens J’en ai aussi profité pour donner une conférence technique et un plus grand public pour les étudiants, staff, et industriels.

Je suis aussi quelques fois invitée pour des conférences internationales : j’ai participé en avril 2018 à la journée internationale de la femme au sein de Google Singapour.

En plus de donner de mon temps pour inspirer la jeune génération, je suis aussi la marraine de la bourse Nadia Payet, que j’ai mise en place avec le Women Center à l’Université de Washington à Seattle. Cette bourse récompense chaque année 2 étudiantes méritantes qui commencent leurs études supérieures dans le domaine de l’informatique ou des sciences. J’essaie actuellement de mettre en place une bourse similaire à l’Université de la Réunion.

CPE Lyon offre chaque année des possibilités d’échange à l’étranger, mon conseil est, si possible, d’essayer d’en profiter ! C’est beaucoup plus simple de commencer une carrière aux Etats-Unis en partant d’un visa étudiant. C’est assez compliqué autrement de trouver une entreprise pour un stage ou un CDI, puisque c’est lourd pour les compagnies américaines de s’occuper des papiers pour l’immigration d’un ressortissant français.

Pour ce qui est des qualités techniques, nous sommes très bien formés en France, donc mon seul conseil c’est de trouver des projets personnels pour s’améliorer en programmation, ou de pousser les projets scolaires un peu plus loin que le minimum demandé. Les petites touches personnelles sont bien vues sur un CV, et montrent que vous vous êtes intéressés au domaine, que vous êtes passionnés, et que vous êtes prêts à un faire plus. Chez Google, on appelle ça “passion for learning”, et ça fait une différence, surtout pour être accepté pour un stage !

Enfin, la persévérance et le travail sont les clés de la réussite, et si on a envie d’apprendre et d’améliorer ses compétences, on met toutes les chances de son côté.