La "mentor attitude" en temps de COVID et ce qu'il en résulte : quatre mentors témoignent...
Chaque année, plus de 80 mentors encadrent les équipes de Projet de Création d’Entreprises (PCE) pour les années 3. Leur rôle consiste à coacher les étudiants dans leur projet, à les accompagner à chaque étape : la création, la conception, le marketing, le financement, l’industrialisation, la commercialisation du produit ou du service innovant…
Cette période particulière a modifié leur façon de travailler avec les étudiants.
De gauche à droite : Francis Martin, Jean-Pierre Robinet, Didier Thierion et Georges Tramblay
Quatre d’entre eux témoignent :
« Pour la 5ème année consécutive, j’accompagne une équipe dans le cadre du programme PCE (Projet de Création d’Entreprise). Le but fixé est lucratif : l’entreprise créée doit atteindre un profit.
Par des rencontres régulières (1 par mois en moyenne) dans les locaux de CPE Lyon, j’oriente, je stimule, je préconise, j’explique, je forme, j’informe, j’encourage, je conseille, je valide….mais n’ordonne jamais, ni ne décide, tranche ou arbitre… Je partage ainsi mon expérience professionnelle d’entrepreneur avec pour objectif : communiquer le goût de l’innovation, de la création voire de l’entrepreneuriat.
Je suis également animateur de l’atelier Finances et assure des permanences dans ce domaine à l’approche de la remise du Business Plan.
Lors des rencontres avec l’équipe « en présentiel », familier des contacts humains, je cherche particulièrement à créer un climat de confiance afin que chaque membre de l’équipe soit en capacité de s’exprimer. L’exercice est plus difficile « en distanciel » qui, comme l’expression l’indique, crée de la distance ! Avec l’impossibilité de voir tous les étudiants (certains PC n’étant pas équipés de caméra), les pannes de connexion, la lenteur des débits,…. Et le manque de familiarité d’usage de ces outils (surtout pour le mentor que je suis !), les « timides » renoncent facilement à prendre la parole. Au début de chaque « visio » j’essaye de faire s’exprimer les étudiants sur leurs difficultés à vivre cette période. A les écouter, ils font preuve d’une bonne résilience, mais sont ravis de retrouver « du présentiel » (pour les TD par exemple).
Je suis retraité depuis 6 ans et au cours de ma vie professionnelle en PME je n’ai pas, ou peu, eu à utiliser la communication par « visio ». Je ne connais donc pas les codes, les astuces, les outils et j’éprouve des difficultés à transmettre par ce moyen, mon enthousiasme et ma passion pour l’entreprise. Et j’en suis frustré !…..Mais je persévère ! »
Jean-Pierre Robinet
« Pour le programme PCE de CPE Lyon, j’accompagne un groupe d’élèves. Je me positionne comme un consultant accompagnant la création d’entreprise, de la même façon que dans ma vie professionnelle. D’ailleurs certains d’entre eux sont allés jusqu’à la création de l’entreprise.
L’année dernière, la brutalité de l’arrivée du confinement a été assez facilement compensée par l’utilisation des plateformes de communication car nous étions en phase de finalisation du projet. Même l’épreuve de l’oral ressemblait aux présentations que nous faisons en entreprise à l’international.
En revanche, cette année est bien plus compliquée car je n’ai vu physiquement mon équipe que deux fois. Néanmoins, nous avons compensé par des réunions hebdomadaires systématiques le dimanche soir à 19h !!!! Et tout le monde est présent. Ce qui montre bien l’intérêt et la motivation du groupe. Et nous avons plaisir d’échanger et de travailler ensemble. »
Francis Martin
« Le mentor doit être encore plus attentif au travail des étudiants suite à la COVID et par conséquent à l’impossibilité de réunions en présentiel.
Il est plus difficile pour le mentor de créer cet égrégore indispensable pour bâtir un projet en commun.
La distanciation ne facilite pas la communication-ce n’est pas une découverte-et certains se cachent derrière l’extinction de leur caméra. Ce mode de réunion en visio leur donne également la possibilité d’avoir d’autres activités en parallèle (consultation/écriture de SMS/mails, …) ce qui conduit à une baisse manifeste de leur concentration sur le sujet traité.
Contrairement à la réunion en présentiel, il n’est pas possible pour le mentor de capter le regard d’un étudiant qui semble moins attentif/impliqué afin de le ramener au cœur des échanges verbaux en cours. En sens inverse, la prise de parole par un membre du groupe est plus difficile surtout lorsqu’un autre membre s’exprime trop longuement. C’est pour cela qu’il nous est plus difficile d’analyser correctement l’engagement et le travail voire l’implication de chacun et par conséquent d’aider ceux qui sont à la traîne pour garder cette osmose nécessaire à la construction de tout projet.
Nous sommes frustrés de ne pas pouvoir sentir l’esprit d’équipe. Ainsi la cohésion ne peut pas s’appréhender correctement car nous ne sommes pas ensemble au même moment au même endroit, donc sans filtre.
Pour pallier tous ces inconvénients, nous avons décidé de réunir tous les membres du groupe 1h toutes les deux semaines en visioconférence afin de maintenir un rythme soutenu à la conduite de ce projet et de les amener à travailler ensemble entre 2 rendez-vous. Dans ces conditions, il apparaît que la distanciation ne pénalise pas tant que cela l’avancement du dossier de l’équipe que nous avons à gérer. »
Georges Tramblay et Didier Thierion